Une seule priorité politique : conquérir l’IA !

« Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés » : ces célèbres vers de La Fontaine s’appliquent parfaitement à la confrontation des hommes au progrès à travers les siècles. Et aujourd’hui, à l’intelligence artificielle. De la santé à la monnaie en passant par les tâches domestiques, l’IA bouscule tous les aspects de la vie humaine. Tout comme l’invention de l’imprimerie ou la fordisation de l’industrie, elle est une révolution à laquelle personne n’échappe et à laquelle nous devons tous être préparés.

C’est un défi gigantesque qui appelle une réponse de même ampleur ! À l’image du programme Apollo, je veux proposer un projet d’« IA Nation » pour que la France et l’Europe partent à la conquête de l’IA. Il nous faut laisser suffisamment de liberté pour que les technologies continuent de progresser, tout en fixant des lignes rouges.

Nous avons deux grandes forces pour construire notre IA Nation : nos opérateurs télécom et nos cerveaux exceptionnels que les géants de l’IA nous envient. En réalité, ce qu’il nous manque, c’est une volonté politique nationale et européenne pour nous mettre à la table d’un nouveau Yalta du numérique.

Si nous voulons être pionniers dans le développement de la 5G et des autres nouvelles technologies, faire exister nos opérateurs télécoms est indispensable. Avec 105 opérateurs en Europe contre 3 en Chine ou aux Etats-Unis, la consolidation s’impose pour faire émerger un marché unique des télécoms.

Ensuite, l’IA Nation permettra de mieux retenir nos talentueux entrepreneurs et chercheurs. Car à cause d’une fiscalité confiscatoire et d’une politique de données peu attractive, la plupart d’entre eux partent sous des cieux plus cléments. Si le projet de taxe GAFA est très imparfait, dans son assiette comme dans sa dimension uniquement nationale, son produit pourrait compenser les exonérations fiscales sur les bénéfices réinvestis en R&D que j’appelle de mes vœux, tant les startups de notre pays souffrent d’un déficit de financement. Ce que les Américains font depuis plusieurs années !

Il s’agit également de développer un cloud européen. Je propose que d’ici 2023, l’ensemble des données de nos entreprises et de nos concitoyens soient stockées sur le sol européen et manipulées uniquement par des acteurs européens. Réduction des parts de marché des GAFAM, garantie de la protection des données selon des standards européens, stimulation de nos acteurs économiques : tous ces avantages liés à un cloud unique sur le territoire ont été bien saisis par l’Estonie qui a créé la X-Road, ce cloud national crypté sur lequel se retrouvent toutes les données de l’Etat et donc de chaque citoyen.

Enfin, nous devons continuer de former nos cerveaux aux enjeux du numérique, pour qu’ils ne cessent d’être à la pointe. En imaginant l’« école IA », une école où l’IA est au cœur de nos programmes. Cela commence bien entendu en formant nos enfants au code dès le plus jeune âge, mais aussi en leur apprenant à vivre dans un univers scolaire digitalisé. À Meaux, où je suis maire depuis 1995, nous équipons toutes nos écoles d’outils numériques (vidéoprojecteurs interactifs, tablettes…) pour que tous nos jeunes parviennent à les maîtriser. Et il faut aller plus loin en proposant ces apprentissages tout au long de la vie. En Finlande, des cours permettant à l’ensemble de la population de se familiariser étroitement à l’IA, font l’objet d’un véritable succès.

En bâtissant une stratégie d’IA Nation digne du programme Apollo, entrons de plain-pied dans le siècle de l’IA !

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Tribune de Jean-François Copé sur le site de Forbes publiée le 24 avril 2019.

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